ZZAJ est un spectacle mêlant musique et humour sur l’histoire du jazz, créé par des artistes sortant d’école de jazz avec une passion pour le partage avec le public. Inspirés par Jacob Collier et d’autres artistes, ils ont développé des arrangements musicaux en direct, jonglant avec différents instruments et styles. Le spectacle allie virtuosité musicale et humour, avec des interactions avec le public. Leur tournée inclut des dates en France et à La Réunion, avec des projets futurs incluant un nouveau spectacle musical centré sur leurs propres compositions.


l’interview

Djazia Ahrénds-Benhabilés: Qu’est-ce qui vous a inspiré à créer ce spectacle mêlant musique et burlesque sur l’histoire du jazz ?
Matthias Lauriot Prévost & Augustin Ledieu : On sortait d’école de jazz. Cinq ans de cette musique dans les pattes et une furieuse envie de rencontrer le public. D’abord dans des bars, puis des soirées privées, on s’est aperçu qu’elle ne parlait pas à beaucoup de gens. On a donc mis instinctivement les standards dans l’ordre chronologique et commencé à raconter l’histoire. Et comme on ne sait pas être sérieux longtemps, on a rapidement entre-tissé notre pédagogie de blagues. Quand Sandrine Righeschi, la metteuse en scène, est venue voir cette petite conférence humoristique guitare/voix dans un théâtre de poche à Pigalle, elle a tout de suite vu le potentiel de ce qui est devenu ZZAJ
Comment avez-vous choisi les différents morceaux et artistes que vous présentez dans le spectacle ?

Quand le travail de mise-en-scène a commencé avec elle, nous avons repris la structure de notre conférence. Pour chaque grande période nous avions un morceau qui nous semblait emblématique, choisi par souci de caractériser le style sans prendre des morceaux trop entendus. Sandrine a poussé pour une sélection plus populaire. Le jazz est lointain pour beaucoup. Il fallait reconnaître les morceaux immédiatement et pouvoir se les approprier pour que le public non-averti entre plus facilement dans cet univers exigeant

Pouvez-vous nous parler du processus de création des arrangements musicaux pour votre performance ?
Nous avons d’abord créé en 2019 une version guitare/voix. Mais notre ambition était autrement plus grande. Inspiré par un artiste qui nous écrasait de génie, Jacob Collier, nous voulions imiter son inventivité dans sa façon de sauter d’un instrument à l’autre sur scène. Nous avons donc étudié le système de looping amélioré qu’il utilise, tenté de comprendre ses principes et recréé tout ça avec nos moyens, en détournant l’utilisation classique d’Ableton Live. A chaque début de morceau, nous cliquons donc sur une pédale qui déclenche un arrangement. L’ordinateur est programmé pour enregistrer certains instruments à certains moments et les rejouer en boucle derrière. A nous d’être au bon endroit au bon moment !
Quel est le défi le plus excitant de jouer plusieurs instruments et de jongler avec différents styles musicaux sur scène ?
Ils sont multiples ! Mais le plus excitant est probablement de réussir à combiner la justesse de jeu instrumentale pour faire sonner l’arrangement dans chaque style, la justesse de jeu scénique pour faire grandir le personnage et la qualité de relation au public pour faire grandir la connexion. Quand tout ça vient ensemble et s’aligne, c’est un moment de communion avec le public !
Comment maintenez-vous l’équilibre entre la virtuosité musicale et le côté humoristique de la performance ?
Comme on peut ! Dans un aller retour constant entre l’oreille externe et l’oreille interne. L’oreille externe pour entendre la justesse, le placement rythmique, la qualité de son. L’oreille interne pour entendre la justesse de l’intention, le placement intérieur du personnage, la vérité de ce qu’il vit à l’instant T. Il y a donc des fois où l’angoisse du personnage handicape le son, comme on réalise mal quelque chose dans la vie quand on est pris par la peur. Matthias qui est plus méticuleux que moi sur la musique a dû se déplacer beaucoup pour accepter cette interaction moins évidente à un pur musicien. Mais c’est justement cet aller-retour qui fait la force du spectacle
Y a-t-il des moments improvisés ou interactifs avec le public dans votre spectacle ?
Plusieurs, issus justement de notre conférence musicale de départ. Il est essentiel pour nous que le public soit physiquement intégré à la musique
Quels sont vos artistes de jazz préférés et comment ont-ils influencé votre propre style musical ?

Jacob Collier en est le premier pour tous les deux. Matthias est fan de Pat Metheny. Nous aimons beaucoup les musiciens qui se tiennent à la frontière de l’architecture et de la virtuosité jazz et de la musique populaire. Armstrong, bien sûr, Duke Ellington, Quincy Jones, et plus récemment Bobby McFerrin ou Jamie Cullum nous marquent beaucoup. Populaires et exigeants. C’est ce que nous voulons faire. Et c’est dur…

Quelles sont les réactions les plus mémorables que vous avez reçues de la part du public lors de vos représentations ?
Ceci s’explique par plusieurs facteurs qui ne sont pas que dus à notre talent. Mais le public se lève toujours à la fin du spectacle. Chaque fois c’est pour nous un moment de grand enthousiasme. Voir les gens emportés par le spectacle et profondément avec nous.
Une fois, un homme que nous avions fait monter sur scène a utilisé un fouet que nous lui avions demandé d’actionner devant le micro pour accompagner un bruitage pour nous fouetter nous directement.
Et une dame touchée par mon déséquilibre sur une caisse pendant un morceau est venue s’assoir pour la stabiliser. Ce qui m’a profondément déstabilisé
Quelle fut l’étape la plus complexe dans la création du spectacle ?
La création du spectacle. Sandrine tirait vers le clown. Matthias tirait vers la musique. Je tirais vers le show peu importe où ça allait. C’est l’équilibre de ces trois angles d’attaque qui fait l’identité de ZZAJ aujourd’hui. De plus, nous avons nos caractères et travailler étroitement dans une création pousse chacun dans ses retranchements.
Avez-vous prévu une tournée ?
Nous avons eu un peu plus de 20 dates partout en France cette année ainsi qu’une série parisienne au Grand Point Virgule tous les mercredis entre janvier et mars. Nous serons au festival Komidi à La Réunion du 17 au 29 avril. Puis nous jouerons à Avignon (Théâtre de l’Arrache-Coeur) cet été. L’an prochain, nous pensons avoir 20-25 dates de tournée en France ainsi qu’une nouvelle série parisienne que nous reprendrons au Grand Point Virgule fin septembre tous les mercredis jusque fin décembre. Après, surpriiiiiiise ! On verra bien.
Quels sont vos projets futurs en tant que musiciens et artistes de spectacle vivant après “Voyage aux Pays du Jazz” ?”
Aaaaah! Eh bien le projet qu’on rêve de créer avec Matthias depuis le départ ! Un show musical à base de compositions. Scénographié, chorégraphié, mais plus centré sur la musique. Des musiques que nous aimerions dans la ligne de nos influences multiples : Vulfpeck, Stevie Wonder, Michael Jackson, Stromae, Jean-Jacques Goldman, Gael Faye. Quel lien, nous direz-vous? Vous verrez bientôt…