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Zora Bensliman à la comédie Dalayrac

En raison de ma double culture franco-algérienne, je m’interroge constamment sur la place que j’ai, que je me donne, que je prends dans la société.
Comment la trouver ? Comment la définir ? Où est-ce que je me situe par rapport aux autres ? Ma place à l’école, dans la famille, dans la fratrie, au travail, la place des filles et celle des garçons.
Le projet est né d’une longue interview filmée de quatre heures pendant laquelle j’ai interrogé ma mère sur son histoire. Des sujets forts abordant l’Algérie française, la guerre, le rapport qu’elle entretenait avec sa fratrie ont révélé une histoire complexe, une famille divisée entre ceux qui pouvaient partir et ceux qui le ne pouvaient pas. En 66, son mari prend la décision de partir à Roubaix, eldorado qui ne ressemble en rien à ce qu’elle imaginait, ou elle rejoint le reste de sa famille. Entre bière et débauche d’un côté, marché aux légumes, plus rassurant, où ma mère retrouve sa communauté de l’autre, le choc culturel est là ! Entre un mari autoritaire et des voisins ignorants pour ne pas dire racistes, ma mère se fraye un chemin en apprenant à baisser les yeux. Sans savoir trop quoi, Elle souhaitait autre chose pour ses filles.

Tous fans de la chanson française, nous avons été bercés par la chanson de Oum Kalthoum, mais aussi de Charlélie Couture et Véronique Sanson. Ma mère elle-même conservait précieusement une photo du couple idéal Sheila et Ringo! La France est entrée chez nous par la musique et ce n’est peut-être pas un hasard si je suis chanteuse aujourd’hui.
Manquant de repères forts (l’école n’en a pas été un), j’ai grandi sans filet et appris la débrouillardise, avec l’impression souvent de traverser ma vie sans vraiment la vivre.
Aujourd’hui, je décide de retraverser mon histoire à travers l’écriture d’un spectacle. Il aura fallu du temps, que je décroche mon bac à 40 ans, suivi d’une licence, pour trouver la légitimité de monter sur scène et de prendre la parole.

À travers des souvenirs d’enfance et de jeunesse, Guerre, paix et bidoune évoque le féminisme, la religion, les complexes et les contradictions de cette double culture avec la volonté de ne rien dramatiser, loin de tout dogmatisme. J’aimerais sortir des poncifs, aborder les choses sans tabou, loin des étiquettes et des préjugés.
Si j’ai grandi dans une « schizophrénie identitaire », me poussant à avancer comme une équilibriste, j’ai dû m’adapter, m’ouvrir aux autres, nourrissant un intérêt toujours plus grand pour l’humain et toutes ses différences.
André Gide a dit un jour « Choisir c’est renoncer » et j’ai compris que je ne voulais renoncer à rien. Comme disait ma mère, je veux « le dessert et le fromage » autrement dit le makrout et le camembert. Je veux être libre et acceptée comme ça.
Ce spectacle citoyen que je voudrais accessible à toutes et à tous offre de véritables tranches de vie, comme un joyeux bazar mêlant chants, musiques et textes. Je raconte ainsi ma propre France prenant résolument le parti de rire des difficultés que j’ai rencontrées. Difficultés qui me semblent toujours d’actualité pour les jeunes générations, comme une histoire sans fin
A l’heure actuelle où tant de gens se sentent exclus, où le ciment républicain s’étiole, où le manque d’écoute, l’hostilité, la peur de l’autre s’installe, je souhaite résolument aller vers, plutôt qu’aller contre, pour continuer à en-chanter mon réel et celui des spectatrices et des spectateurs qui viendront écouter mon histoire. Je souhaiterais que d’autres personnes puissent se retrouver dans mon histoire, ouvrir le débat, que tout le monde puisse prendre la parole.
L’élargissement du projet et partenariats : Action culturelle
Guerre, paix et bidoune est produit par Théâtre Autrement et fait l’objet d’un partenariat avec le centre d’art contemporain de Roubaix, l’Espace Croisé et l’association AEP en octobre 2020. C’est un projet pluridisciplinaire qui s’inscrit plus largement dans une démarche pédagogique, mêlant la pratique théâtrale, notamment le travail sur l’oralité, et l’écriture auprès de collégiens.
Un partenariat avec le collège Gustave Courbet de Romainville est également en projet dans le cadre du dispositif « Culture au collège » et le département de la Seine-Saint-Denis. Il s’agirait de mettre un atelier de théâtre-forum pour des élèves de 3ème SEGPA et classes Relais en 2020-2021 autour du thème développé dans mon spectacle.
Je souhaite que la parole s’ouvre à tous, je veux l’amener en coulisse, dans le public et dans les écoles, pour que le dialogue existe avant et après la scène. La question de l’autre et du lien est essentielle. C’est à travers le partage, l’ouverture sur le monde que l’on se comprend, que l’on comprend l’autre, et que l’on trouve enfin sa place.
Le sentiment d’être différents et hors du groupe, que j’aborde dans mon spectacle est un sentiment bien connu de ce public qui a besoin de reconnaissance, comme moi. Je souhaite par cette intervention, leur montrer que ce questionnement est universel et légitime.
Biographie
Zora Bensliman est à la fois comédienne, chanteuse et intervenante de théâtre. Elle est aussi partout à la fois : roubaisienne de naissance, algérienne d’origine et parisienne d’adoption depuis bientôt vingts ans.
C’est d’abord par la chanson qu’elle fait ses premiers pas sur scène : Lauréats découverte du Printemps de Bourges en 1998 avec son complice Jean-Philippe Courtois, ils composent trois albums, Zora réalise deux clips qui sont remarqués par une presse élogieuse dont Libération, Femme Actuelle et Rolling Stone. Elle parcourt les scènes nationales et internationales, compose en collaboration avec Mathieu Chedid, chante en duo avec Frank VandeCasteel et joue en première partie de Charlélie Couture et Mathieu Chedid. Elle se produit dans son Nord d’origine – Le Grand Mix, Le Colisée, La Cave aux Poètes, La Boîte à Musique – comme dans les grandes

salles parisiennes – La Cigale, le Bataclan et l’Alambra où Zora rend hommage à Jean Ferrat aux côtés d’autres artistes dont Thomas Pitiot et Julie Rousseaux.
Musicienne autodidacte et amoureuse de la parole, elle se lie en parallèle au monde du théâtre. Depuis plus de vingts ans, Zora intervient sur les ateliers de Bailleul auprès de jeunes publics qu’elle dirige d’une main de maître chaque année dans un spectacle dont elle assure, avec Jean- Philippe Courtois, l’écriture et la mise en scène. Elle anime des ateliers de théâtre forum pour transmettre sa passion et donner la voix qu’elle aurait aimé qu’on lui donne.
C’est après avoir décroché son bac et une licence à la quarantaine qu’elle trouve la légitimité de monter sur scène et retraverser son histoire avec l’écriture d’un spectacle : Guerre, Paix et Bidoune qui est produit par Théâtre Autrement et fait l’objet d’un partenariat avec le centre d’art contemporain de Roubaix, l’Espace Croisé et l’association AEP. Au sein du collectif 4 Women show, elle présente des extraits de son spectacle, des tranches de vie qu’elle offre au public en espérant que d’autres personnes se retrouvent dans son histoire. Guerre Paix et Bidoune se veut conversation plus que one woman show. C’est un projet de spectacle débat encadré pas des actions culturelles auprès des lycées.La parole s’étend de la scène aux publics. Exit le monologue, Zora n’est pas véritablement seule en scène.

Zora Bensliman

Dates: 1, 8, 15 octobre à 21H15
10 novembre, 8 décembre 2020et jusqu’en juin 2021 une fois par mois
Comédie Dalayrac